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Chantier : la basilique de Vézelay retrouve sa beauté originelle
Publié le 06/12/2019 dans Revues de presse
L’ancienne abbatiale de Vézelay (Yonne) est en cours de restauration. Les travaux de l’avant-nef concernent l’allégement du poids des voûtes, la réfection des enduits à la chaux et des greffes de pierre par empreinte numérique.
L’ancienne abbatiale de Vézelay (Yonne) est en cours de restauration. Les travaux de l’avant-nef concernent l’allégement du poids des voûtes, la réfection des enduits à la chaux et des greffes de pierre par empreinte numérique.
Ancienne abbatiale romane établie au IXe siècle dans la petite commune de Vézelay (Yonne), la basilique constitue à la fois un haut lieu de pèlerinage et de tourisme. Chaque année, elle accueille un million de visiteurs. Un succès qui tient notamment à son histoire constructive puisque c’est l’architecte Viollet-Le-Duc qui a engagé une rénovation complète en 1840. Il a, en particulier, rehaussé les quatre dernières voûtes de la nef afin de retrouver leur hauteur romane d’origine.
Or, depuis l’an 2000, l’édifice montrait de nouveau des signes de fatigue. Sa structure et spécifiquement les contrebutées n’étaient pas adaptées à l’encaissement des voûtes en plein cintre, ce qui a provoqué différents désordres : les voûtes étaient déformées et les murs basculaient vers l’extérieur. Autre problème lié au défaut d’étanchéité de la toiture, les voûtes ont subi des infiltrations. Elles étaient abîmées, tachées, comportaient des auréoles et des fissures. Enfin, certaines pierres se sont avérées cassées.
Une fois ce diagnostic posé, restait à organiser la restauration. Au préalable, un nuage de points a été réalisé afin de disposer d’un relevé détaillé de l’existant. C’est l’agence 2BDM qui a pour mission d’orchestrer les opérations. « Nos travaux veulent respecter l’œuvre fondatrice de Viollet-le-Duc », explique Christophe Wagner, architecte du patrimoine chargé du projet.
Débuté en 2014, le chantier s’organise en plusieurs tranches. Actuellement, les travaux concernent la consolidation et la restauration de la partie ouest, avec les voûtes en berceau de l’avant nef et ses façades.
Gros œuvre : alléger le poids des voûtes
Afin de pallier aux problèmes structuraux d’origine, l’agence 2BDM a choisi d’alléger le poids des voûtes, en remplaçant le remblai posé par Viollet-le-Duc par des billes d’argile expansée (sur une hauteur d’1,40 m à partir du point bas de la voûte) et en réduisant l’épaisseur des dalles de sol de moitié (elles passent de 12 cm à 5 cm). Une intervention délicate mais non invasive qui permet de stabiliser l’ouvrage de façon durable.
Réfection des enduits à la chaux aérienne
Dans les hauteurs de la basilique, les aléas du temps ont marqué les voûtes qui présentent les symptômes liés aux défauts d’étanchéité de la toiture. Abîmées, parsemées de taches, de fissures, d’auréoles, les enduits à la chaux repris par Viollet-le-Duc nécessitaient une remise en état. Dans l’avant nef, leur restauration actuelle à des hauteurs de 10 et de 20 m concerne une surface d’environ 1000 m². Les problèmes étant ponctuels et non généraux, 30 % seront entièrement refaits, le reste sera simplement restauré.
Pour ce faire, la chaux aérienne Tradical H98 de l’industriel BCB est employée. « Le choix de ce matériau s’est imposé comme une évidence historique, puisque les voûtes d’origine en étaient revêtues », explique Christophe Wagner.
La première étape a consisté à repérer les enduits abîmés et à les purger. La pose de la chaux s’effectue ensuite en plusieurs passes. « Nous appliquons d’abord un mortier à granulométrie importante (0,4mm) à la truelle et sur 5 cm d’épaisseur », détaille Jean-Baptiste Théret, conducteur de travaux chez SNBR. Il sèche en une quinzaine de jours. Une couche de finition de 5 à 10 mm, constituée d’un sable de 0,2 mm, vient ensuite tendre les arêtes et redonner la forme finale de la voûte. L’entreprise applique ensuite une polissure de 1 à 2 mm d’épaisseur sur les parties restaurées comme sur les parties anciennes afin d’uniformiser l’ensemble. En dernier lieu, « une patine à l’eau de chaux passée à la brosse amène les nuances et l’effet nuageux à la surface », précise Christophe Wagner.
Fabrication de la chaux aérienne
La chaux résulte du calcaire cuit à haute température (800 °C – 900 °C). Pendant la cuisson, le gaz carbonique contenu dans la roche s’évapore. A la sortie, on obtient de la chaux vive, un matériau moins lourd, très corrosif et avide d’humidité. Lorsque la chaux vive est précipitée dans l’eau, elle dégage de la chaleur. La matière éteinte qui s’effrite jusqu’à devenir une poudre est ensuite récupérée.
Elle est ensuite mélangée à des granulats pouzzolaniques et à de l’eau afin de produire une pâte, appliquée traditionnellement à la truelle. Une fois mise en œuvre, l’eau de gâchage s’évapore, laissant derrière elle un matériau poreux, qui se recarbonate alors naturellement. Un processus par lequel la chaux redevient pierre. Cette prise au dioxyde de carbone de l’air caractérise la chaux aérienne, vis-à-vis de sa cousine la chaux hydraulique. L’enduit ainsi obtenu présente l’avantage de laisser respirer son support.
Greffe de pierre par empreinte numérique
Enfin, l’originalité des travaux réside dans l’usage du numérique. Ici, l’entreprise SNBR, accompagnée de l'agence 2BDM, a mis au point une technique de greffe par empreinte numérique afin de réparer les pierres abîmées. Sur les pierres dont les cassures présentaient des reliefs complexes, la méthode a longtemps consisté à réaliser une retaille où sceller la partie neuve. Une opération qui réduit significativement la quantité de pierre d’origine. « Ici, nous numérisons les empreintes des parties cassées, puis nous concevons virtuellement la partie manquante », précise Jean-Baptiste Théret. La nouvelle pierre est ensuite sculptée dans ses moindres détails par un robot développé par l’entreprise. Elle s’emboîte ainsi parfaitement dans la pierre existante.
« Cette technique très précautionneuse est un outil de plus pour les sculpteurs et tailleurs de pierre, qui l’utilisent pour la restauration de pierres sculptées ou moulurées », poursuit le conducteur de travaux. A Vézelay, elle a été employée notamment dans le cœur et la chapelle rayonnante, sur quelques moulures de chapiteau ou base de colonnette située à hauteur d’œil. Dans le cadre de la phase de chantier en cours, les éléments de la sculpture monumentale qui ornent la façade extérieure seront aussi restaurés. En tout, près de 250 éléments seront greffés à la basilique de Vézelay. Cette dernière phase de travaux devra s’achever à l’été 2020.
Fiche technique
Maîtrise d’ouvrage : mairie de Vézelay
Maîtrise d’ouvrage déléguée : Drac
Maîtrise d’œuvre : Cabinet 2BDM
Entreprise chargée de la maçonnerie et des enduits : SNBR
Industriel fournisseur de la chaux aérienne : BCB Tradical
06/12/2019